Democratic Republic of Congo

Déplacé et handicapé, un élève défie son triste destin et se résout à reprendre le chemin de l’école

L’insécurité continue de sévir au grand dam des populations dans plusieurs régions de la République démocratique du Congo. Avec la guerre, les gens sont contraints de fuir leurs maisons et bien des parents ne sont plus en mesure d’assurer la scolarisation de leurs enfants. Malgré cela, certains, comme Tulizeni Kambale Bwanandege, déjouent ce triste destin et reprennent le chemin de l’école.

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Displaced and Disabled, Student Remains Committed to His Studies

Merveille Kavira, GPJ Democratic Republic of Congo

Déplacé et handicapé, Tulizeni Kambale Bwanandege, 22 ans, se rend à l’école pour poursuivre ses études secondaires à Kirumba, en République démocratique du Congo.

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KIRUMBA, RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO — Dans son parcours de vie d’enfance, il n’a été que témoin de massacres et sa famille  était habituée à ce mal de plier bagage pour se sauver  à chaque approche de groupes armés connus pour être des tueurs sans merci.

Tulizeni Kambale Bwanandege, 22 ans, vit aujourd’hui avec son oncle à Kirumba et se démène sans relâche pour finir ses études secondaires et empocher son diplôme malgré une paralysie congénitale de ses membres inférieurs.

Après avoir passé sa jeunesse à fuir des groupes armés, il est aujourd’hui déterminé à décrocher son diplôme si Kirumba, situé à environ 180 km au nord de Goma, demeure à l’abri de l’insécurité.

«J’en ai marre de fuir; je n’en peux plus, » s’insurge-t-il à bout de souffle, car, étant obligé de marcher avec ses mains, chaque pas qu’il fait pour marcher lui coûte énormément d’énergie.

Bwanandege appartient à l’une de plus de 9 000 familles enregistrées par les Nations Unies comme ayant, en 2016,  fui leurs maisons dans les territoires de Masisi, Rutshuru, Walikale et Lubero dans la province du Nord-Kivu, selon Kasereka Kirao, conseiller administratif auprès de la Section des migrations de la Division de la population du Département des affaires économiques et sociales de l’ONU à Kirumba.

Depuis 1996, le Nord-Kivu a, de manière particulière, été la proie de conflits violents ayant entraîné avec eux plusieurs groupes armés. C’est entre autres le cas des groupes armés comme Maï-Maï Shetani, Nyatura, Nduma Defence of Congo, Cheka, Jackson, Mazembe, Corps du Christ et d’autres groupes étrangers qui se sont infiltrés dans la province.

En date fatidique du 28 novembre 2015, la famille de Bwanandege a fui le village de Kateku à Walikale, près de 59 kilomètres de Kirumba.

« Un groupe de gens inconnus ont pris d’assaut notre village, décapitant nos voisins et mettant feu à nos maisons », dit-il.

Après l’attaque, lui et sa famille se sont  réfugiés à Miriki, mais les groupes armés ont ensuite attaqué cette zone et y ont tué des gens. Dans la nuit du 6 janvier 2016, dit-il, deux épouses du chef de village local, le Mwami, et leurs cinq enfants ont été décapités.

«C’est alors ce qui m’a poussé de fuir jusqu’à Kirumba», déclare Bwanandege.

Il participe à des réunions de soutien à Kirumba parrainées par le Centre d’encadrement des personnes vivant avec handicap où il partage ses expériences avec d’autres jeunes handicapés. Créé en 2009, ce centre,  comme l’affirme son président Paluku Siwaviosi Maangaiko, a pu encadrer 629 personnes handicapées et appuyer des programmes éducatifs permettant aux personnes handicapées  d’échapper au sort d’être réduites à la mendicité pour survivre.

Après chaque déplacement, Bwanandege reprend toujours le chemin de l’école.

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Merveille Kavira, GPJ Democratic Republic of Congo

Tulizeni Kambale Bwanandege, 22 ans, étudie à l’Institut Umoja de Kirumba en République Démocratique du Congo et suit l’option Secrétariat administratif.

«En dépit d’une grave crise causée par la guerre, j’ai toujours gardé mon moral et tenu bon face aux  épreuves pour reprendre le chemin de l’école», dit-il.

Les camarades de Bwanandege à l’Institut Umoja de Kirumba sont nombreux à apprécier son attitude et sa détermination.

«Il ne s’est jamais considéré comme handicapé», dit son camarade de classe John Kasereka Iulihakuhi. « J’apprécie la façon dont il se comporte en classe et son courage. »

«Il est obligé d’escalader des montagnes pour se rendre à notre école en ne se servant que de ses mains», dit Kahindo Sindayabo.

Kambale Bahani, préfet des études de l’école, affirme que Bwanandege n’a jamais été en retard à l’école en dépit de son handicap. «Il a les mêmes compétences que les autres élèves. C’est un élève très appliqué », dit-il.

Bwanandege nourrit l’espoir qu’il ne sera plus contraint de fuir. Il en appelle au gouvernement de sécuriser tous les villages, même ceux qui sont les plus reculés.

«Je nourris le rêve de pouvoir finir mes études, trouver un emploi, fonder une famille et être stable une fois dans ma vie», renchérit-il.