À propos de cette série: Des journalistes de Global Press Journal dans le monde ont décrypté les approches, notamment les valeurs et les priorités, en matière de santé reproductive dans leurs communautés respectives ainsi que l’impact des politiques internationales sur ces dernières. Lisez ici pour les autres articles de cette série proposée pour votre goût tout au long du mois.
KOMANDA, RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO — Aux dires des femmes vivant dans des camps de déplacés ici dans la province de l’Ituri, dans l’est de la République démocratique du Congo, il a toujours été difficile pour elles d’accéder aux soins de santé reproductive dont elles ont besoin.
Pourtant, aujourd’hui, les défis sont encore plus effrayants depuis le départ d’une organisation grâce à laquelle la gratuité des soins de santé était possible pour elles.
« L’état de santé des mères et des enfants se détériore jour après jour », déplore Esperance Chachimwa, chargée de nettoyage dans les camps.
Ici, on dénombre cinq camps qui, au total, comptent près de 5 500 déplacés qui s’y retrouvent contre leur gré. Les motifs en sont variés : violents conflits entre communautés, oppression par des groupes armés Maï Maï en quête de contrôle des territoires et des ressources et afflux dans leurs propres villages de bandits sortis de la forêt qui les dépouillent de tous leurs biens.
Des gens contraintes aux déplacements se retrouvent partout dans cette région forestière, ayant évacué leurs maisons, chassés par des groupes armés ou à cause d’une implication des forces gouvernementales dans un conflit. Certains camps de déplacés sont organisés et disposent des ressources nécessaires. Et si le besoin s’en fait sentir, d’autres s’érigent spontanément. Des gens contraintes aux déplacements se retrouvent partout dans cette région forestière, ayant évacué leurs maisons, chassés par des groupes armés ou à cause d’une implication des forces gouvernementales dans un conflit. Certains camps de déplacés sont organisés et disposent des ressources nécessaires. Et si le besoin s’en fait sentir, d’autres s’érigent spontanément.
Selon ceux qui vivent dans les camps de la ville de Komanda, ils s’y sentent plus à l’aise que par le passé lorsqu’ils étaient dans leurs villages d’origine. Pourtant, cela ne signifie pas pour autant que la vie y est une sinécure. Selon ceux qui vivent dans les camps de la ville de Komanda, ils s’y sentent au moins plus sécurisés que par le passé lorsqu’ils étaient dans leurs villages d’origine. Pourtant, cela ne signifie pas pour autant que la vie y est une sinécure.
Souvent, on voit des femmes enceintes jusqu’aux yeux se charger des tâches pénibles dans les camps. Certaines s’adonnent au travail des terres, d’autres au transport des produits des champs à la route. Et pourtant, ce genre d’activités empreintes de pénibilité sont déconseillées pendant la grossesse.
Tchina Tchelewa, 25, vit au camp de Baiti et affirme que le corollaire, c’est que nombre d’entre elles finissent par un avortement spontané.
« Ces tâches physiquement éprouvantes que nous accomplissons toute la journée n’ayant même rien à nous mettre sous la dent sont à l’origine de la fréquence de fausses couches », explique Tchelewa, enceinte de sept mois lors du reportage pour cet article.
L’assainissement dans les camps laisse à désirer. Chaque camp dispose d’un grand bloc de latrine à fosse à cinq cabines, ce qui est loin d’être suffisant pour ces communautés en croissance.
À en croire certaines femmes, c’est facile de contracter des infections vaginales et urinaires. Les soins de santé faisant défaut, elles ne peuvent que se contenter de ce que l’on a, même en cas de problèmes de santé de base.
Selon Tchelwea, elle s’en remet à d’autres mères au camp lorsqu’elle souffre d’un problème physique. Elles proposent des remèdes extrêmement rudimentaires.
« Elles m’ont conseillé de presser le jus de citron dans l’eau avec laquelle je lave mon corps », explique Tchelewa. « À vrai dire, cela m’a beaucoup aidé, car notre accès aux soins de santé n’a jamais été aussi difficile qu’aujourd’hui ».
Depuis 2005, la gratuité des soins de santé était assurée par une organisation appelée Medair, financée par Caritas, au centre de santé géré par l’Église catholique à Komanda. Mais le financement de ces soins a été interrompu en 2017. Et aujourd’hui, ces femmes doivent débourser 5 000 francs pour chaque consultation prénatale.
Ainsi, tout comme Tchelewa prend du jus de citron pour soulager sa douleur, nombre de femmes mettent toutes seules leurs enfants au monde à l’aide de tout matériel à leur portée.
Les femmes le savent, l’accouchement à domicile dans le camp pose de graves risques, mais pour accoucher, affirment-elles, la seule solution est de recourir aux sages-femmes traditionnelles malgré le piètre bilan de ces dernières.
« De nombreuses femmes ont perdu la vie en donnant la vie à l’aide des sages-femmes », déplore Julienne Ndungo, déplacée vivant dans l’un de ces camps.
C’est pour cette raison que le gouvernement national interdit aux sages-femmes traditionnelles, qui souvent ne possèdent pas le moindre matériel approprié, d’assister des accouchements à domicile. Les femmes sont plutôt encouragées à se rendre dans les hôpitaux.
Une sage-femme traditionnelle, celle appelée Kadada et qui s’est confiée à GPJ, affirme qu’elle-même et d’autres sages-femmes réussissent à se soustraire à la détection dans les camps.
« Nous continuons à assister des accouchements discrètement, car les autorités sanitaires l’interdisent », révèle-t-elle.
Proposant ses services en toute illégalité, Kadada a demandé que son nom complet ne soit pas publié.
Selon Faustin Aribande, chef d’un camp situé dans la cour de l’église de la Communauté baptiste du Congo à Komanda, ces cinq camps comptent plus de 1 000 mères. Il révèle en outre qu’environ 10 avortements par voie médicamenteuse (à l’aide d’une pilule ou d’une autre option non chirurgicale) et trois décès maternels se produisent chaque mois, sans oublier davantage d’avortements éventuels sans surveillance pouvant avoir lieu à l’insu des autorités du camp.
Même si les services de santé reproductive étaient gratuits, affirment certaines femmes, leurs maris ne leur permettraient pas de recourir à la contraception.
« J’ai neuf enfants, mais quand j’ai dit à mon mari que je voulais me mettre à l’abri de la grossesse une fois pour toutes, il m’a opposé un refus catégorique, disant que je continuerai à accoucher jusqu’à ce qu’il ne reste plus aucun ovule dans mes ovaires », déclare Wasingia. Siheria, 40 ans. Selon Siheria, son mari pense que le recours à la contraception la poussera à l’infidélité.
Adapté à partir de sa version originale en swahili par Ndahayo Sylvestre, GPJ.