KANYABAYONGA, RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO – Romain Justin Makelele gravit une colline pierreuse pour se rendre à la Communauté baptiste au centre de l’Afrique (CBCA). En uniforme des forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), il prend place aux côtés d’un rang de femmes vêtues de robes jaunes et vertes.
C’est un dimanche à Kanyabayonga, une ville de la province du Nord-Kivu, en RDC, et il est venu pour chanter.
Et comme depuis deux ans déjà, cette chorale de 50 membres dont Makelele et trois autres membres des FARDC, trois policiers et des habitants se réunissent presque chaque dimanche dans cette église baptiste.
Être unis dans l’harmonie, tel n’a toujours pas été le cas.
La collaboration entre militaires de la RD Congo et villageois était autrefois quasi inexistante, déclare Alfred Katembo, représentant des membres de la société civile de Kanyabayonga.
Des actes d’extorsion, de menace et d’intimidation proférés en lingala – une langue que les habitants ne parlent pas – ont alimenté la méfiance entre civils et militaires.
« Un militaire était considéré comme un assassin », confie Kakule Visamalya. Il est entraîneur de la chorale.
Mais en 2017, l’Église du Christ au Congo et l’aumônerie militaire de Kanyabayonga ont trouvé une approche unique en son genre pour apaiser les tensions : une chorale civilo-militaire.
« La présence des militaires dans la chorale attire l’attention de tout le monde, car c’est une chose qu’on ne pourrait jamais s’imaginer », déclare le révérend Paluku Safari, 48 ans, pasteur à la CBCA.
Aux dires de Romain Justin Makelele, agent de police judiciaire à l’auditorat militaire de Kanyabayonga et cofondateur de la chorale, la collaboration entre la population locale et la police a été renforcée.
« Ils nous considéraient comme des délinquants », glisse-t-il. « Mais depuis que nous évangélisons, dormons, mangeons et chantons ensemble, la population a compris à 100% que nous sommes les mêmes. Quand un civil me dit quelque chose, je comprends, et vice versa ».
Leur communication se fait par le swahili, une langue commune à ces militaires et ces habitants.
Pascal Bokonde est chef S5 du 3401e régiment des FARDC. À l’en croire, pas moins de 85% des militaires qui socialisent avec des civils le font grâce à la chorale.
« En chantant ensemble, en faisant descampagnes d’évangélisation ensembleet en s’asseyant ensemble, cela nous rapproche de plus en plus et nous amène à une collaboration », affirme-t-il.
Bokonde, déployé dans la région pour assurer la liaison entre militaires et populations locales depuis 2015, affirme que la collaboration entre militaires et civils s’avère importante, en particulier dans des zones souvent en proie à des conflits liés aux terres et au pouvoir.
« En chantant ensemble, nous nous considérons comme des frères », déclare Visamalya. « [Nous] partageons nos joies et nos peines ».
Adapté à partir de sa version originale en français par Ndahayo Sylvestre, GPJ.