Democratic Republic of Congo

RDC: accusés de sorcellerie, des enfants trouvent refuge dans un centre catholique

Selon leurs propres dires, de nombreux enfants en RDC ont été chassés de leur foyer après être accusés de sorcellerie par leurs parents ou proches. En RDC, rares sont les endroits où ces enfants peuvent trouver un abri, mais un centre religieux leur ouvre ses portes.

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Accused of Witchcraft, Children Find Refuge in Catholic Center in DRC

Nadia Kanyere Karasisi, GPJ DRC

Les enfants vivant à la Maison Saint Laurent de Kisangani, en RDC, apprennent des compétences, y compris la menuiserie, présentée ici, et bénéficient d’une éducation de base. Ce centre abrite environ 100 enfants, y compris des nourrissons et des adolescents.

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KISANGANI, RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO — Sarah Nzapa, 12 ans, préfère la vie dans la rue à celle qu’elle menait au domicile qu’elle a fui.

« Je vivais chez ma tante paternelle, et il ne se passait pas une seule nuit sans que je sois ligotée et frappée violemment pour chasser les mauvais esprits qui, selon eux, avaient campé en moi », révèle Sarah.

Sarah révèle qu’elle a été emmenée dans une église où les gens devaient réciter des prières pour chasser les esprits d’elle.

« Pour couronner le tout, un évangéliste de l’église a essayé de m’extorquer des faveurs sexuelles pour, selon lui, m’exorciser », se souvient-elle, ses yeux pleins de larmes.

À l’âge de 11 ans, Sarah a fui, préférant la vie de sans-abri à celle qu’elle endurait.

Ses conditions de vie se sont améliorées lorsqu’un policier l’a trouvée et emmenée à la Maison Saint Laurent, un centre pour enfants à Kisangani, ville au nord de la RDC. Là, elle a rencontré d’autres enfants ayant été chassés de leurs familles ou ayant fui dans la rue suite à des accusations de sorcellerie.

« Ces enfants sont d’abord chassés de leurs familles biologiques », explique le père Gustave Mania, responsable du centre. « On pense qu’ils sont des porte-malheurs ».

La première chose que l’on enseigne à ces enfants est que leurs préoccupations d’être « porte-malheurs » sont sans fondement, confie-t-il. Ensuite, il leur est donné la chance de faire du sport et d’acquérir des compétences, le but étant de les réintégrer dans la société, souligne Mania.

Les services sociaux étant rares en RDC, peu de ressources sont prévues pour les enfants rejetés par leurs familles. Fondée en 1990, la Maison Saint Laurent est l’un de rares endroits où ces enfants peuvent trouver refuge. Aujourd’hui, ce centre abrite plus de 100 enfants, y compris des nourrissons et des adolescents, précise Mania.

Beaucoup d’enfants passant par le centre continuent à réussir leur vie.

« Nous nous réjouissons du fait qu’au moins deux enfants qui sont passés par notre centre aient poursuivi leurs études et étudient actuellement à l’Université de Kisangani », explique Mania. « Outre ceux-ci, il y en a deux autres – l’un travaille à la MONUSCO et l’autre à l’étranger ».

La MONUSCO est la mission de stabilisation des Nations Unies en RDC, pays ayant connu la persistance des violences depuis la guerre civile en 1996.

Nul ne connaît le nombre exact d’enfants vivant dans les rues de Kisangani ni celui de ceux d’entre eux ayant été chassés de leurs familles à la suite d’accusations de sorcellerie. Mais, selon certaines responsables locaux, le problème ne fait qu’empirer. Une loi de 2009 stipule que quiconque accuse un enfant de sorcellerie risque jusqu’à trois ans de prison et une amende, mais cette tendance persiste.

« Les conditions de vie des enfants en rupture familiale devient de plus en plus inquiétante », témoigne Koko Misingi, avocat au Barreau de Kisangani et coordinateur de CAREO, une organisation non-gouvernementale locale s’occupant des enfants.

Ce phénomène pose un autre problème, tout aussi inquiétant, celui de la sécurité des populations locales. Les enfants recourent de plus en plus aux menus larcins et à d’autres délits mineurs, raconte Misingi.

Ces enfants affirment ne pas avoir d’autre choix que de se refaire une vie comme ils le peuvent.

Arsène Motuta, 14 ans, révèle que son père a divorcé de sa mère et épousé une femme qui a abusé de lui et de sa sœur.

« Notre marâtre a même osé aller jusqu’à dire à notre père que le pasteur de son église lui avait dit que j’étais un sorcier et que le fait d’être un sorcier attirait les déboires économiques qui s’abattaient sur ma famille », explique Arsène.

Arsène déclare qu’il ne pouvait plus supporter ce fardeau, décidant ainsi de quitter la maison. Il voulait être en paix avec lui-même et avoir l’esprit tranquille, relate-t-il.

Très vite, l’heure est venue pour lui de trouver la Maison Saint Laurent, qui, selon lui, lui a donné la paix dont il était en quête.

Adapté à partir de sa version originale en français par Ndayaho Sylvestre, GPJ.

Note de la rédaction : cet article a été mis à jour pour se conformer au Guide de style rédactionnel de Global Press.

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